Ma Patrie

di Cheikh Tidiane Gaye

Ma Patrie

Les heures ont filé comme l’éclair
Le jour n’a pas fermé ses yeux
Le chant, la danse, les chœurs, tout s’était tu.

Nos cœurs ont palpité dans le sommeil;
C’était l’ouragan qui battait nos portes
Et brûlé nos bouches et nos langues.

Ils ont réduit en cendres nos âmes,
Terrifié nos regards
Cassé nos miroirs
Incendié notre sang.
Que restait-il à dénoncer?
Les querelles des peuples
Les amers souvenirs
La haine des hommes sans voix et sans langues.
Les trônes furent brûlés, les bois sacrés piétinés
Les lunes orphelines enfantées des nuits infidèles
Mêmes les regards innocents des dignes fils
Ne réussirent à remuer
Les lèvres de nos beautés légendaires et chastes.

Le poète n’égrenait plus ses paroles,
Le feu n’acclamait plus ses illustres
Les flammes embrumaient les lendemains déjà incertains.
Les saintes voix s’étaient tues sous les cieux obscurcis
Et noircis par les haines blanches.
Arrêtez de me suivre!
Je dis et je réitère :«Arrêtez de mouiller mes cordes,
Arrêtez d’empoisonner mes terres et de liquéfier mes fers
Arrêtez d’assécher mes puits de pétrole et de verser mes pleurs.
Pleurer, je pleure, nous avons pleuré hier
Demain, espérons de ne plus nous noyer dans la démence.

Mes rois-O mes braves rois!
Vos noms ont pendu la honte
Et élevé vos rangs
Une vie savourée
Comme le sel aromatisant vos victoires légendaires.
Dans la brousse de paroles,
Je ne sais le mot à cueillir pour vous glorifier
Sachez, O ma patrie
Que j’ai sculpté des lettres dans les soirées magiques,
L’encre, la sueur de nos ancêtres me les arrosait,
Le sourire flamboyant de nos reines me les rendait belles,
D’une beauté qui nourrissait nos songes de nuit.

J’ai tissé mes pagnes de vers,
La poésie me soutient et me loue.
J’ai décliné l’horreur des vains mots,
Combattu jusqu’à ce que
La nuit ne ferme plus ses yeux et ses oreilles.
Quelle nuit!
Elles étaient au pluriel, O mes nuits!
Nuits noires, silences qui vivifiaient les flûtes
Nuits aux encens parfum de nos âmes bergères.
Patrie, tu es ma mère,
La reine mère, gardienne du rectangle de nos espoirs
Tes mains de caresse et de douceur
Cajolaient mon corps en sécheresse.

Par la mémoire du temps
Tu as façonné le lit où fleurissent les verbes
Je m’y étale pour te loger dans le nid des divins louanges.
Irrigué par tes chants,
Nourri par tes chansons,
Je possède le soleil du Verbe
Je suis l’enfant de la belle langue
Mes ancêtres ont toujours dit non
Mes pieds sonnent les hymnes qui rythment
Les pas des vrais pionniers
Que le peintre raconte et que le poète peigne.
Je continuerai à te chanter,
A traire tes puits de sagesse
La genèse des mots et la grandeur des verbes
Et le singulier des germes et le pluriel des graines
Et l’adjectif des qualifiés et le qualificatif des vers.

Je veux parler de toi
Semer dans les périmètres de la paix
Les gerbes de rosées
Pour que naisse l’amour entre tes enfants.

Mon combat est bâtir le sentier fraternel
Le lieu de la purification et non de la honte
J’invoque ton nom dans tous lieux, à la splendeur des lumières
Jusqu’à l’heure des moissons dans les buissons des merveilles.
Les veillées ont invoqué ton rang
Ton sang n’a jamais menti
Les manteaux de tes soldats ont résisté jusqu’à ce que la dignité
Se chante et se meut aux clartés des clairons.


                        

Pubblicazioni

Tratta da:

  • Cheikh Tidiane Gaye, Rime abbracciate - L'étreinte des rimes, Parigi, Éditions L'Harmattan, 2012, ISBN: 9782296559103. Raccolta poetica bilingue pubblicata insieme alla poetessa Maria Gabriella Romani con prefazione della poetessa ivoriana Tanella Boni.

Note